L’importance des travailleurs étrangers temporaires pour la vitalité manufacturière et régionale du Québec

Alors que le Québec traverse une période de changements sur le plan démographique, les régions se trouvent au premier rang des défis liés à la pénurie de main-d’œuvre. Le secteur manufacturier est un pilier économique de nombreuses communautés et est particulièrement touché : plus de 501 500 personnes y travaillent, représentant 12,3 % du PIB ainsi que 86,1 % des exportations québécoises. Le secteur joue un rôle déterminant dans la vitalité économique régionale, et pourtant, il fait face à de fortes pressions.

Le vieillissement de la population accélère la rareté de main-d’œuvre. La proportion de travailleurs de 55 ans et plus atteint désormais 24,3 % dans le manufacturier, comparativement à 21,6 % dans l’ensemble de l’économie. Mais de l’autre côté, la relève est insuffisante : les jeunes de 15 à 24 ans ne représentent plus que 6,4 % des travailleurs du secteur. Dans ce contexte, les travailleurs étrangers temporaires (TET) sont devenus indispensables au maintien même des activités manufacturières.

L’enjeu est particulièrement critique dans certaines régions. En 2024, plus de 11 000 postes vacants ont été recensés dans le secteur, dont par exemple 1 350 en Chaudière-Appalaches et 2 750 en Montérégie. Ces postes sont majoritairement essentiels ou spécialisés et soutiennent l’ensemble des chaînes de production. Sans TET pour combler rapidement ces besoins, ce sont non seulement les entreprises qui ralentissent, mais aussi des emplois de Québécois qui se retrouvent fragilisés.

Le recours aux TET n’est pas un choix, c’est une réponse essentielle à une réalité démographique incontournable. Les entreprises ont d’ailleurs fait leur part en rehaussant significativement les salaires : entre 2019 et 2024, le salaire moyen manufacturier a augmenté de plus de 25 %, atteignant 33,79 $/h. Malgré ces efforts, la main-d’œuvre demeure insuffisante.

C’est pourquoi Manufacturiers & Exportateurs du Québec réitère l’importance de mettre en place des mesures qui assurent la stabilité des travailleurs déjà présents. Une clause grand-père permettrait aux TET établis dans nos régions de conserver leur emploi malgré les changements réglementaires à venir. Ces travailleurs sont déjà intégrés dans leur milieu et contribuent pleinement à l’économie locale et à la continuité des opérations manufacturières.

Au-delà de leur apport immédiat, les TET représentent aussi un bassin naturel d’immigration permanente. Ils travaillent en français, sont installés en région, et occupent précisément les métiers en déficit identifiés par Québec. Cependant, l’accès actuel à la résidence permanente demeure trop restreint et trop lent. Pour sécuriser la main-d’œuvre du secteur et favoriser la rétention en région, il est essentiel d’accélérer et assouplir les parcours. Ceci peut être réalisé notamment via le nouveau Programme de sélection des travailleurs qualifiés (PSTQ).

Les mesures fédérales et provinciales doivent être adaptées aux réalités des régions. Par exemple, l’application uniforme de limites salariales ou de seuils de travailleurs à bas salaire pénalise directement les régions manufacturières, où les salaires moyens diffèrent largement de ceux des grands centres.

En somme, les TET au Québec sont bien plus qu’une solution d’appoint : ils représentent une condition essentielle à la vitalité économique régionale et à la pérennité du secteur manufacturier. Assurer leur maintien, faciliter leur transition vers la résidence permanente et adapter les programmes aux besoins réels des entreprises, c’est protéger la croissance économique de toutes les régions du Québec.

Julie White

Présidente-directrice générale de Manufacturiers & Exportateurs du Québec