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Point de vue de partenaire

Le logement communautaire et les régions

04 février 2023

Réseau québécois des OSBL d'habitation

En ces temps de crise du logement et de pénurie de main-d’œuvre, se pourrait-il que l’obstacle principal à l’intégration des personnes immigrantes en région ne soit plus l’accès à un emploi, mais l’accès à un logement? Et que semblablement, la rareté de logements adéquats soit le frein numéro un au développement des régions? La situation est telle que certaines régions se retrouvent devant une impasse ironique : des projets de nouveaux logements ne peuvent pas être mis en chantier, car il n’y a pas de logements pour loger les constructeurs pour ces projets!

Les deux objectifs que sont l’intégration des personnes immigrantes en région et le développement des régions, pour s’accomplir, doivent notamment s’ancrer dans le logement. Sans logements disponibles, pas de développement ni d’intégration. Devant la pénurie de logements, les gouvernements québécois et canadien misent sur l’augmentation de l’offre, mais sans nécessairement privilégier des modèles qui favorisent une abordabilité réelle et surtout pérenne. Malheureusement, les logements ainsi financés s’avèrent inaccessibles pour les ménages à faible revenu. C’est ce qu’a dénoncé récemment Marie-Josée Houle, défenseure fédérale du logement au Canada.

Le logement doit être pensé au-delà « qu’un toit et quatre murs » et sa problématique autrement qu’une de « portes », qu’il nous faudrait dès lors multiplier « à tout prix » sans considérations autres. D’ailleurs, le Canada a souscrit au droit international, qui précise sur le droit au logement qu’il se rapporte à la dignité humaine, et que les personnes ont droit à un logement adéquat, sûr et sécuritaire. Le logement doit donc répondre aux besoins du ménage et ne peut pas ou ne devrait pas, par exemple, exercer de pression financière importante sur le ménage, ni être le lieu de discrimination injustifiée

L’intégration des personnes immigrantes en région, le développement des régions et la crise du logement requièrent toute une intervention structurée et lourde de nos gouvernements - une qui ne se borne pas à des carottes pour le marché lucratif. Heureusement, le Québec bénéficie déjà d’un important parc de logements « non-lucratifs » que l’on nomme « le logement social et communautaire » : celui-ci comprend les organismes sans but lucratif d’habitation (« OSBL-H »), les coopératives d’habitation et les logements administrés par les offices d’habitation.

Les OSBL-H

Il existe au Québec environ 1250 OSBL-H ; on les retrouve tant en ville qu’en région. Ce sont des organismes communautaires autonomes qui offrent du logement pour les personnes et ménages à revenus faibles ou modestes, ou ayant des besoins particuliers en habitation. La clientèle cible pour ces logements varie d’un organisme à l’autre; il peut s’agir de personnes aînées, de personnes en situation d’handicap, de femmes victimes de violence conjugale ou encore de familles ou personnes seules à modestes revenus.

Outre leur nature non-lucrative, ces organismes sont le fruit d’initiatives citoyennes, et leur fonctionnement interne est démocratique. La participation des locataires dans la gestion de leur milieu de vie fait de ceux-ci des habitats riches et collectifs, pour les personnes de peu de moyens et souvent marginalisées. Ce modèle permet aussi l’implication du milieu dans la gestion et l’administration des ensembles immobiliers.

Les OSBL-H au Québec sont regroupés sous 8 fédérations territoriales, qui sont elles-mêmes regroupées au sein du Réseau québécois des organismes sans but lucratif d’habitation (le « RQOH »). Leur mission est de rassembler, soutenir et représenter les OSBL-H, afin de contribuer au développement et à la pérennité de leur mouvement, et ainsi faire avancer le droit au logement et améliorer les conditions d’habitation des Québécois.es.

À titre d’exemple : le village de 3 500 âmes nommé Dégelis, situé dans la MRC de Témiscouata. En 1978, cette communauté met sur pied un OSBL-H : les Habitations Dégelis. Le projet de logement communautaire porté par l’organisme permet la construction dès 1979 de 24 logements, suivi de 12 autres en 1983. Inspiré de ce premier succès et constatant des besoins locaux en habitation, l’organisme développera de nouveaux ensembles résidentiels en 1985, 2004, 2012 et 2014.

Aujourd’hui, l’organisme offre 72 logements pour familles et 38 logements pour personnes retraitées, pour un total de 110 logements communautaires et réellement abordables. Ces projets ont permis de réaliser à certains égards le droit au logement pour ses habitant.es, et ils ont aussi été bénéfiques pour l’économie et le développement de la région. D’ailleurs, les logements construits en 2014 ont, dès la première année, été presque tous occupés par de nouveaux arrivants à Dégelis.

En conclusion, ce double constat : (1) les OSBL-H des régions sont une porte d’entrée prometteuse pour l’établissement et l’intégration des personnes immigrantes en région; et (2) les OSBL-H forment un modèle d’habitation dans lequel nos gouvernements doivent investir pour assurer l’abordabilité et la vitalité des milieux de vie, qui sont si nécessaires au développement des régions et à l’intégration des personnes immigrantes en région.

Pour connaître les OSBL-H d’une région spécifique, nous vous invitons à contacter la fédération d’OSBL-H de la région qui vous intéresse. La liste et les informations de ces fédérations se trouvent sur le site du RQOH, au www.rqoh.com.